La Nuit Des Trente

Boris travaille comme directeur artistique chez Canal +, il est sur le point d'avoir trente ans. Le jour de son anniversaire, il décide de passer une nuit un peu spéciale afin de graver cet événement dans sa mémoire et marquer d'une pierre blanche cette nouvelle étape de son existence. Car il sent confusément qu'il abandonne quelque chose aux "vestiaires de l'enfance", selon la formule de Patrick Modiano. Mais quoi ? Avec la fin de la vingtaine, c'est une forme de légèreté qui disparaît ; les décisions qu'il prend désormais l'engagent plus matériellement dans le réel. Pour tromper sa solitude, son angoisse, il boit, passe de bar en bar, de rencontres en rencontres, notamment avec des gens plus jeunes que lui, des étudiants délurés au contact desquels il mesure l'écart de mentalité avec sa génération. Il fait la connaissance de Louise, jolie jeune femme de 25 ans qui rédige une thèse de linguistique à la Sorbonne, mais elle disparaît, emportée par le mouvement de la soirée. Plus tard, après minuit, Boris atterrit dans une boîte de nuit où, de plus en plus alcoolisé, il provoque une bagarre et se fait jeter par les vigiles. En errant dans les rues du quartier de la Butte aux Cailles, il tombe sur une joyeuse tablée de sexagénaires qui l'invitent à boire du vin et se moquent gentiment du manque d'audace et de fantaisie de sa génération. Le portable de Boris sonne, c'est Louise qui l'invite à prendre un dernier verre chez elle alors que la nuit touche à sa fin. Ils couchent ensemble, puis Boris sombre dans le sommeil. À l'aube, de retour à son domicile, on comprend que Boris est marié et père d'un petit garçon. Ce roman bref est animé par un style alerte qui insuffle de la vitesse au récit et le sentiment que la nuit nous file entre les doigts. Les personnages sont porteurs d'idéaux et de questions propres à cette génération de trentenaires qui arrivent dans la vie active et se débarrassent peu à peu de leurs illusions. L'intrigue, efficace et prenante, est traversée par une mélancolie joyeuse.